L’autoédition de livres francophones imprimés : un continent ignoré
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L’offre de livres autoédités s’est considérablement développée au cours des deux dernières décennies, poussée par l’évolution de la technique dans la chaîne du livre, le développement du commerce en ligne et la désintermédiation dans les industries culturelles. L’autoédition et ses particularités sont pourtant assez mal connues. L’offre de livres autoédités privilégie-t-elle certains segments ou sous-segments éditoriaux ? Le profil sociodémographique moyen des auteurs autopubliés diffère-t-il de celui des auteurs publiés par les maisons d’édition traditionnelles ? Quel est l’appétit des acheteurs pour les livres autoédités et de quelle manière les éditeurs classiques utilisent-ils l’autoédition ? L’exploitation statistique inédite des données, pour les seuls livres imprimés, du dépôt légal et de l’institut GfK permet d’apporter des premiers éléments de réponse à ces questions avec, en creux, celle de savoir dans quelle mesure l’autoédition de livres diversifie l’offre éditoriale.Ainsi, en 2015, près du quart des livres papier déposés à la Bibliothèque nationale de France (BnF) sont autoédités, contre un dixième il y a 40 ans. La même année, 61 % des livres autoédités relèvent de la littérature et des techniques d’écriture contre 43 % des livres à compte d’éditeur édités traditionnellement. Si la part qu’occupe ce segment éditorial progresse pour les deux types de livres entre 2006 et 2015, la progression est plus forte en autoédition. En 2015, au sein de la littérature française, la poésie occupe une part deux fois plus importante parmi les livres autoédités que parmi ceux édités classiquement, 60 % des livres de poésie étant autopubliés. Les romans sont aussi surreprésentés en autoédition, à l’inverse de la bande dessinée et de la littérature jeunesse. Du côté des auteurs de littérature française ayant déposé au moins un livre entre 1970 et 2016, 49 % ne connaissent que l’édition traditionnelle, 40 % uniquement l’autoédition. Parmi ces auteurs, 72 % des 30 ans et moins ne connaissent que l’autoédition, contre 24 % qui ne connaissent que l’édition classique. La part des autrices est la même entre les deux modes exclusifs d’édition, autour de 41 %. Enfin, parmi les auteurs de littérature francophone hors traductions ayant publié entre 2007 et 2016, ceux exclusivement édités traditionnellement publient un nombre moyen de livres deux fois plus élevé que celui des auteurs exclusivement autoédités. L’autoédition est moins présente que l’édition classique dans les ventes de best-sellers et plus présente en queue de distribution des ventes. Le passage en maison d’édition traditionnelle pour les auteurs initialement autopubliés renforce significativement leurs ventes.
The supply of self-published books has grown considerably over the last two decades, driven by technical developments in the publishing supply chain, the growth of online commerce and disintermediation in the cultural industries. However, the intricacies of self-publishing remain largely unknown. Are there certain segments or sub-segments that are more likely to be self-published? Does the average socio-demographic profile of a self-published author differ from that of an author published by a traditional publisher? What is the market appetite for self-published books and how do traditional publishers utilise self-publishing? Sourced from legal deposit and the GfK institute, unprecedented statistical analysis based on printed books alone provides some initial answers to these questions, with the underlying question being to what extent self-publishing diversifies the range of works published.In 2015, nearly a quarter of the paper books deposited at the Bibliothèque nationale de France (BnF) were self-published, compared with a tenth 40 years ago. In the same year, 61% of self-published books were in the field of literature and writing techniques, compared with 43% of traditionally published books. While the share of this publishing segment rose for both types of book between 2006 and 2015, the increase was greater for self-publishing. In 2015, within French literature, poetry accounted for twice as many self-published books as conventionally published ones, with 60% of poetry books being self-published. Novels are also over-represented in self-publishing, unlike children’s literature and comics. Among authors of French literature who have submitted at least one book between 1970 and 2016, 48.5% have done so solely via traditional publishing and 40% via self-publishing. Among these authors, 72% of those aged 30 and under are self-published, versus 24% who have gone down the avenue of traditional publishing. The proportion of female authors is the same across both publishing methods, at around 41%. Lastly, among authors of French-language literature (excluding translations) who published between 2007 and 2016, those who are exclusively traditionally published publish an average number of books that is twice as high as that of exclusively self-published authors. Self-publishing is less present than traditional publishing in bestseller sales, and more present at the tail end of distribution sales. For authors who were initially self-published, the move to a traditional publishing house significantly boosts their sales.
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